mercredi 10 juin 2009

Tom & Dom, retour sur une success story des années 90

Campagne de publicité American Express – 1994

Flashback en 1994. Allez, un petit effort de mémoire. Pour la bonne cause, promis.

A cette époque, les icônes de la mode, les "Tops", s’appelaient Linda, Cindy, Naomie ou Claudia et les maisons de mode de luxe s’apprêtaient à entrer dans l’aire des couturiers stars, incarnés par le charismatique Tom Ford.

Cette publicité American Express met en scène la star montante de Gucci et son alter ego, le génial Domenico De Sole. Ensemble, ils sont en passe de réussir la plus belle résurrection de l’histoire du luxe, faisant d’un maroquinier italien moribond le deuxième plus gros groupe de luxe du monde. Ils seront bientôt au sommet de la planète luxe.

Tom Ford, alors directeur artistique de Gucci, fait face à Domenico De Sole, l’avocat historique de la marque italienne, devenu entre temps CEO de Gucci Group. On s’amuse du contraste, on admire les deux hommes, et les valeurs qu’ils incarnent. Le premier, saharienne, T-shirt, lunettes aviator et barbe de 3 jours, est accoudé nonchalamment à une ferrari vintage. Le second, en costume italien sur-mesure, incarne le monde de la finance et de l’argent. La scène se passe devant le canal de Venise. Packshot ; c’est dans la boîte. Le produit Gucci, la marque Tom Ford, ou l’inverse. L’american dream et le vieux continent sont réconciliés le temps d’une campagne.

Ces deux-là incarnent alors l’irrésistible ascension des groupes de luxe, et la dictature en marche d’un glamour opulent et assumé. L’un tire les ficelles dans l’ombre des conseils d’administration. L’autre, control freak revendiqué, plus décideur que créateur selon ses propres aveux, homme d’image et trendsetter avant la lettre, s’apprête à inventer le porno-chic, petit concept qui va tout simplement révolutionner notre façon de penser les codes du luxe moderne, en les réinventant, les remettant en cause.

A vrai dire, Tom Ford incarne la « Désirabilité », une recherche plus sensualiste, individuelle, affective du luxe… Une logique érotique qui renvoit aux émotions. Ensemble, Tom Ford et Domenico De Sole réconcilient création artistique et marketing.

Mais était-ce vraiment nouveau ?

Imaginez un instant Monsieur Saint Laurent, accoudé à un bolide italien, posant avec Pierre Bergé devant le porche d’un palace du triangle d’or… Ça aurait eu de la gueule, non ?

L’image du créateur, un risque que les marques doivent maîtriser

La décennie suivante verra l’avènement des créateurs ultra-médiatisés : John, Karl, Hedi, Marc, D&G… mais jamais dans un tel mélange entre l’image de la maison et la leur. Au jeu des egos démesurés, l’aire des dictateurs artistiques tout-puissant s’achèvera quelque part au milieu des années 2000. La raison, toujours la même : money talks. Car si elle bénéficie à plein du buzz et de la notoriété créée autour de la personne du créateur, la marque perd le contrôle de son destin. Si l’image du créateur se détériore dans les médias, pire si le créateur vient à disparaître ou à quitter la marque, la confusion créée entre celui-ci et la marque sera très difficile à gérer. À ce titre, les égéries, éléments relativement interchangeables, sont un palliatif pour un luxe qui passe aujourd’hui obligatoirement par le tapis rouge.

Belle époque que cette année 1994 : on commençait déjà à parler de marketing du luxe, et on ne parlait pas encore de self-branding, bien que cela ait toujours existé. Et on en redemandait…

Alors oui au droit d’inventaire, mais pas sans avoir préalablement rendu quelques hommages... luxe oblige !

1 commentaire:

  1. Au moins Tom et Dom n'ont fait que jouer leur propre role. Excellente cette publicité ! I want Tom Ford back in fashion luxury ...avec lui au moins c'était sexe, glamour et rock and roll.

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